"Le seul capital qui compte"
Protéger la forêt Guinéenne
"The only capital that matters"
Protecting the Guinean forest
Guinea Conakry
2022
(Made with the World Bank and the Guinean national office of national parcs)
"Le seul capital qui compte"
Protéger la forêt Guinéenne
"The only capital that matters"
Protecting the Guinean forest
Guinea Conakry
2022
(Made with the World Bank and the Guinean national office of national parcs)
En 2022, la Banque Mondiale a pris la décision d'investir massivement en Guinée Conakry pour favoriser la création d'un réseau de 18 parcs nationaux et sanctuariser des aires naturelles uniques au monde.
Intégré aux équipes de rangers, j'ai sillonné cinq d'entre elles afin d'entamer un travail documentaire sur les futurs parcs nationaux, et de raconter le quotidien de ces hommes qui luttent au quotidien pour préserver le vivant, sans armes ni moyens.
In 2022, the World Bank took the decision to invest massively in Guinea Conakry to promote the creation of a network of 17 national parks and to sanctuarize these unique natural areas in the world.
As part of the teams of rangers, I traveled through five of them in order to start a documentary work on the future national parks, and to tell the daily life of these men who fight daily to preserve the living, without weapons or means.
Le soleil vient juste de se lever sur le village de Bari Khouré, dont le nom signifie "la rivière aux esprits" en langue Soussou. Pourtant Alpha Suma se plaint déjà, comme à l'accoutumée, de la chaleur excessive qui accable la localité, située au pied des plateaux, au cœur de la magnifique réserve naturelle de Kounounkan.
« Je possède une plantation d'orangers. Auparavant, mes oranges restaient sur les arbres jusqu'au mois de mai. À présent, la plupart des fruits jaunissent et tombent à un stade prématuré, » explique l'agriculteur.
Bari Khouré est un village agricole du sud de la Guinée, qui produit de nombreuses cultures : riz, manioc, maïs, ainsi qu'une grande variété de légumes. Les terres arables sont rares dans la région, alors les agriculteurs défrichent des parcelles de la réserve naturelle pour faire pousser les récoltes indispensables à la région et au pays.
En plus de la pression humaine, qui menace les forêts, le changement climatique s'est installé. Au village, tout le monde fait le même constat : « Même lorsque nous essayons de reboiser, de nombreux arbres ne survivent pas car le climat a changé et les saisons ne sont plus les mêmes depuis quelques années, » rappelle Ishmael, un voisin d'Alpha. « C'est le serpent qui se mord la queue : plus on est amené à avancer dans la forêt, plus la forêt rapetisse, et avec le recul de la forêt, l'humidité aussi diminue. »
Le projet aide l'Office guinéen des parcs nationaux et réserves de faune (OGPNRF) à développer un réseau de zones protégées pour préserver le capital naturel du pays. Ses activités contribueront à réduire les émissions de gaz à effet de serre, tout en améliorant la résilience des écosystèmes et des zones en aval, et elles fourniront également des emplois verts aux communautés locales.
Le lieutenant Tounkara, chargé de la coordination du projet sur le terrain, s'appuie sur ses "troupes" au niveau local pour défendre l'écosystème : une armée d'éleveurs, d'agriculteurs et de chasseurs, qui ont tous constaté la rapide dégradation de leur environnement en seulement quelques dizaines d'années.
Ensemble, ils ont décidé d'unir leurs forces pour aider à préserver les ressources.
Régulièrement, les membres de la communauté, toutes générations confondues, se rassemblent sur la place du village pour partager les défis auxquels ils sont confrontés avec les gardes forestiers et les conservateurs. « En créant des zones protégées, il ne s'agit pas de chasser des populations ou de leur imposer des contraintes, mais de préserver et renforcer leurs moyens de subsistance, » explique le lieutenant Tounkara.
« La protection des zones forestières contribuera à la stabilité climatique pour les récoltes et créera des opportunités économiques grâce aux produits issus de la forêt, notamment les plantes médicinales traditionnelles et des aliments naturels essentiels comme les champignons, les noix, les feuilles et les baies. »
Avec un revenu moyen par foyer dépassant à peine 1 000 dollars par an (en 2021), la Guinée fait partie des pays les moins avancés (PMA), mais le potentiel de développement dans les secteurs des pêcheries, de la foresterie et de l'exploitation minière est élevé.
D'ambitieuses politiques et réformes ont ainsi été adoptées pour aider à réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre et promouvoir des mesures de développement résilientes au changement climatique.
Les îles de Loos, situées à quelques encablures de Conakry forment un archipel de 60 Km2, en partie sanctuarisé depuis 1992. Outre la protection de faunes comme les tortues marines vertes et diverses espèces d’oiseaux et de poissons, le sanctuaire permet la reproduction des tortues marines sur l’ilot Cabri, la réintégration des chimpanzés sur l’île blanche et le repeuplement d'oiseaux de mer sur l’île Corail.
Bien qu’elles fournissent des services précieux voire indispensables, les mangroves sont en déclin dans le monde entier en raison des pressions anthropiques et naturelles : en Guinée, plus de 11 hectares de mangrove ont été perdues entre 2016 et 2020. Pour lutter contre ce phénomène dramatique, le pays et ses partenaires investissent massivement.
En longeant les kilomètres de mangroves qui bordent les bras de mer de la réserve de Kankoure, le combat qui se joue pour la survie de cette flore essentielle à la lutte contre les effets du changement climatique ne saute pas aux yeux.
Pourtant en s’en approchant de plus près, sa destruction devient visible, évidente : partout, des coupes sèches. Et à rythme régulier, des pirogues de toutes tailles chargées de bois à destination de Conakry ou des villages côtiers. Perchés dans un dédale de racines plongeant dans la boue, celles et ceux qui pratiquent la coupe illégale de la mangrove ne craignent pas vraiment les patrouilles des écogardes : « Nous n’avons même pas de pirogue à nous. Quand nous voulons organiser une tournée, nous devons louer un bateau à un pêcheur, et encore, pour une durée limitée faute de moyens », se désole unLieutenant de l’Office Guinée des Parcs Nationaux.
Le constat est partagé par nombre de ses collègues, y compris dans les réserves terrestres dans lesquelles « les braconniers ont des tous terrains et nous, même pas un vélo pour leur courir après », expliquait un conservateur.
Pourtant, il y a urgence : la croissance démographique, l’urbanisation et l’élévation du niveau de la mer exposeront un nombre croissant de personnes et de biens aux inondations et à l’érosion côtière, laissant entrevoir des drames humains et économiques certains pour des populations contraintes à l’exil et privées de leurs moyens de subsistance.